Droit d’asile : autour du film « les Arrivants »
Article paru dans Politis le jeudi 8 avril 2010, par Christophe Kantcheff
Le film « Les Arrivants » raconte le parcours du combattant de demandeurs d’asile en France. Claudine Bories et Patrice Chagnard les ont filmés dans les locaux d’une association, la Cafda. Ils montrent la dureté de la tâche des accueillants, confrontés à des lois de plus en plus restrictives.
Photo Julie Romano
Ils s’appellent Kaneshamoorty, Mulugheta, Wong. Il y a aussi la jeune Zahra, qui est enceinte. Ils viennent du Sri Lanka, d’Éthiopie, de Mongolie, elle est Érythréenne. Ils ont quitté leur pays parce qu’ils y étaient persécutés, ont payé des passeurs qui les ont conduits en France. Ils ont été déposés devant un établissement, dans le XXe arrondissement de Paris : celui de la Coordination pour l’accueil des familles demandeuses d’asile (Cafda). Et là a commencé pour eux un difficile parcours du combattant entre précarité d’existence et maquis administratif, avec pour objectif le sésame du statut de réfugié délivré par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).
Claudine Bories et Patrice Chagnard, qui ont posé leur caméra à la Cafda pendant l’été 2008, ont filmé ces demandeurs d’asile épaulés dans leurs démarches et leurs demandes d’aide par les salariés de l’association, missionnée par l’État.
Le résultat, les Arrivants, est passionnant. L’une des grandes qualités de ce film est de saisir au plus près ce que signifie « accueillir » en ce début de XXIe siècle dans un pays comme la France. De montrer à quoi ressemble notre Ellis Island, où des citoyens d’un monde secoué par l’Histoire viennent tenter leur chance d’une vie nouvelle. Abscons, aléatoire, douloureux, l’accueil que la France leur réserve est symbolisé dans le film par deux assistantes sociales, la jeune Caroline et l’expérimentée Colette, qui, sous la pression des demandes, en butte aux contraintes financières et à l’incurie d’une législation kafkaïenne, souffrent dans leur métier. En vérité, leur place est intenable. L’accueil, pour la France, marque de générosité et d’ouverture sur le monde, est devenu une croix. Une corvée.
Depuis le tournage des Arrivants, les portes se sont encore rétrécies. Péril sur le droit d’asile ? Certainement. Espérons cependant que le superbe film de Claudine Bories et Patrice Chagnard contribuera à lever le voile sur une réalité dont notre République ne peut guère être fière.